CHATEAU DE BEAUCASTEL – CHATEAUNEUF DU PAPE

01_BEAU_Image 1
02_BEAU_Triptyque
03_BEAU_Image 2
04_BEAU_Image 3
05_BEAU_Image 4
06_BEAU_Image 5
07_BEAU_Plan
08_BEAU_Photo maquette 1
09_BEAU_Photo maquette 2.1
10_BEAU_Photo maquette 2.2
11_BEAU_Photo maquette 2.3
12_BEAU_Photo maquette 2.4
13_BEAU_Photo maquette 2.5
14_coupe-Beau-Mathieu
previous arrowprevious arrow
next arrownext arrow
+ Informations
Nom du projet  : Extension d’un chai dans les Châteauneuf-du-pape
Localisation :  Beaucastel – 84
Date : Concours 2018
Maître d’Ouvrage : Privé
Surface8 400 mÇSDP
Coût :10 500 000 € HT
Programme :Réhabilitation et extension d’un chai viticole
Équipe : COMBAS Architectes + Menos e Mais
Images : COMBAS

“L’architecture et un mélange de nostalgie et d’anticipation extrême”
-Jean Baudrillard

Une intention pour un lieu

Comme nous avons pu vous le présenter, le projet naît d’une intention forte, créer une Oasis, un havre de verdure, protégé du Mistral au milieu des vignes et du plateau de Chateauneuf du Pape. Ainsi le nouveau château de Beaucastel s’inscrit dans une géométrie carrée, protégé par une enceinte faite des espaces servants. A l’intérieur de cet écrin, 2 axes structurants desservent les différentes parties du tout : cour des visiteurs, extensions du chai, et cour technique à l’Ouest du Carré ; à l’Est, l’ancien château et la nouvelle salle de dégustation, le parc divisé en 3 jardins et les espaces de vie pour les travailleurs, le gardien, et la famille à l’Est. Dans le lointain, le bâti organisé par une géométrie forte protège un parc qui émerge et signal le château.

Les constructions neuves se tiennent toutes sous le faîtage des toitures existantes, sans dépasser les 7,5m de hauteur emprunté à l’ancien chai. Ce parti fort nécessite donc d’enfouir sous terre certaines nouvelles constructions, tel que l’entrepôt ou les chais. Ces mouvements de terres et les nombreuses démolitions en moellons de pierre serviront de matière première pour bâtir les constructions. En toitures, les tuiles canal de l’existant seront réemployées, préservant ainsi l’aspect historique, tout en fabriquant une unité empruntée dans le déjà là.

Sol, ciel, terre forment les trois matériaux du vin qui fabriqueront demain et pour les générations futures l’architecture de Beaucastel.

Une architecture faite de permanences et d’évidences

Le projet dessine des séquences faites d’espaces forts, pourtant depuis l’ancien portail Sud du Château nous avons essayé de maintenir l’équilibre d’une permanence des lieux et d’un effacement du projet. Cette disparation est rendue possible par le respect de l’implantation des nouveaux bâtiments, prenant place peu ou prou sur l’emprise des anciennes constructions.

Ici, nous avons imaginé une architecture faite de lignes répondant à des courbes pour fabriquer des jeux d’ombres et de lumière, scandant la déambulation du visiteur comme du travailleur. L’épaisseur du programme et de la matière mise en œuvre pour bâtir sert à composer des situations de contrepoints mémorables pour les visiteurs.

Un parcours, pour des récits

Le chemin à travers les vignes conduit le visiteur à franchir un porche qui scande une première séquence d’ombres et de contre-jours pour pénétrer l’enceinte du domaine. Au bout de cette allée, un plan d’eau s’offre à nous, sa présence barre la limite sud du Domaine : d’un côté les vignes et la pleine lumière, de l’autre le couvert végétal du parc fabrique une ombre protectrice. Ici se dévoile une cour plantée de sujets remarquables (micocoulier, érable de Montpellier, Marronnier) abritant les voitures du soleil. L’aile Est fabriquée par une grande arche laisse à nouveau entrevoir, à travers une galerie ombragée, le parc du château. Devant le visiteur, une autre galerie protège la façade du nouveau chai construit en terre compactée ; l’ombre du auvent permet au regard de s’acclimater à la pénombre. En s’avançant on découvre à l’intérieur de ce nouvel espace d’accueil une remarquable voûte haute de 6m. Cette forme séculaire dans la pénombre, est mise en perspective par un appel lumineux cru du soleil tombant à la verticale dans la cour de service. Appelés par la lumière, les visiteurs s’avance vers la suite de la visite.

Devant cette cour, le parcours commence par la salle de réception des raisins (rouge et blanc séparément), ici seront comptés les vendanges et l’éraflage, les pressoirs… Derrière nous des arches ouvrent des vues sur la vinification, c’est par une rampe douce pavée de brique, que l’on descend sous terre. En bas, deux autres nefs de 9m de hauteur abritent les cuves à troncs coniques en bois de chêne ou de châtaignier, servant à la vinification des raisins réductifs. L’enfouissement du nouveau chai 3.00m plus bas offre une inertie favorable, les parois en terre participent à maintenir une bonne hygrométrie, ces deux paramètres clés lors de la vinification en raison de l’évaporation et des dégagement de chaleur.

En s’avançant plus loin sous la terre dans la pénombre d’un couloir étroit, les visiteurs pourront découvrir une salle circulaire depuis laquelle un cercle de ciel semble plus proche que le reste de la pièce à l’image du travail de James Turell où un anneau blanc lisse, se pose en contrepoint total à la matière rugueuse que l’on arpente. Ici la famille nous raconte, la vision du Grand père, pionnier pour la mise en œuvre de la biodynamie, et dont la mémoire reste un élément clé pour la fabrication et la vinification. Plus loin dans le passage souterrain, une lumière solide tombe directement sur le sol par l’ancien puits abandonné guidant le visiteur jusque là.

Au bout du couloir un petit escalier permet de regagner la bâtisse pour découvrir à l’intérieur l’élevage en barrique, votre méthode d’assemblage et les espaces dédiés à la vinification des vins Oxydatifs et des blancs. Le projet prévoit l’isolation de la toiture. Il pourrait également être étudié un traitement chaux chanvres pour avoir des murs perspirants capables de mieux

réguler l’hygrométrie. Après une rapide traversée de la cave des bouteilles récentes, on accède directement à la nouvelle cave œnothèque, où sont entreposées les 40 000 bouteilles de chaque millésime, réservées aux restaurateurs et grands clients de la famille. Enfin, en ressortant de la caven un escalier dessert par demi-niveau l’ensemble du château, et permet aux visiteurs de boucler la visite au rez de chaussée dans la nouvelle salle de dégustation.

Un paysage, des jardins

Cet espace de forme semi-circulaire en double hauteur est tourné vers un premier jardin planté dans un esprit de “Jardin Monde”. Là, une large palette d’essence florale, arbustive, graminée, cohabite pour former des toiles impressionnistes changeante au fil des saisons.

Depuis la salle de dégustation, une enfilade de pièces commandées longe la façade XVII° jusqu’à la salle de réception du château, et sa cuisine attenante. A travers la voûte en pierre, on s’avance sur la terrasse pour découvrir le jardin historique où ont été ménagés l’ensemble des grands sujets, pin parasol, tilleul, micocouliers, cèdres et saule ; le bassin classique se dégage sur l’horizon et les rangs de vignes. Sous le couvert végétal, des lignes plantées dans une alternance de plantes agricoles et décoratives organise la perspective, pour inviter vers le Sud où la ligne d’eau marque une limite symbolique entre le parc et les vignes.

Sur l’aile Est, les jardins privatifs jouissent d’une position légèrement dominante 1m au dessus du parc, pour se cacher tout en offrant une vue plus dégager sur le grand paysage. Pour regagner sa voiture et quitter le domaine il faut arpenter un déambulatoire inspiré des anciens cloîtres cisterciens de Provence. Nous voulions offrir ici un recoin protégé du Mistral qui puisse être à la fois un formidable cagnard en hiver, autant qu’une terrasse plus intime face à un jardin ou essences, couleurs, et feuillages se répondraient en contraste, et complémentarité pour composer lieu plus onirique à la façon des jardins de Piet Oudolf. Ainsi chacun de ces 4 jardins participe a fabriquer une Oasis, un lieu mémorable prolongeant la visite à l’extérieur du bâti.

Une matière, des mises en oeuvre

Pour bâtir le projet, il faudra excaver 22 000m3 de terre, dont 5 000m3 serviront à la construction des murs et des voûtes du chai, 3 000m3 serviront pour les murs d’enceintes en béton cyclopéens de moellons et de galets, et enfin la surélévation des jardins privatifs nécessiteront eux aussi 3 000m3 de terre. Soit un peu plus de la moitié des terres issues du terrassement, lié au projet. Nous travaillerons durant la suite des études pour essayer de valoriser davantage de matière et ainsi éviter de

déplacer des terres en dehors du chantier.

L’analyse des prélèvements sur site a permis d’identifier une terre argileuse à 24%, ce qui convient parfaitement à la technique du pisé, ou à la fabrication de briques de terre crues comprimées. Ce dernier matériau est utilisable en structure (murs droits ou voûtes) comme en parement. Les études plus poussées devront déterminer si la terre sera travaillée selon la tradition constructive millénaire de petites briques, ou avec des plus grands éléments préfabriqués sur site par une machine expérimentale. Nous pourrions dans ce cadre précis faire appel à des subventions de l’ADEME, visant les Programmes des Investissements d’Avenir qui participent à subventionner l’écart entre une technique traditionnelle et un processus expérimental. Cela afin de limiter le coût pour vous de cette nouvelle technologie.

Les matériaux du site se retrouveront également dans les murs d’enceintes et les galeries, ainsi autour de la cour technique réalisée en béton cyclopéen incorporant dans une surépaisseur de Béton Armée des blocs de pierre issus des démolitions, et des galets roulés, issus du calibrage des terrassements. Cette technologie alternative offrira une trace de la préexistence, une matérialité robuste et texturée pour accrocher les jeux de lumiéres.

Enfin certains ouvrages tel que le patio circulaire, ou l’entrepôt de stockage nécessiteront des techniques de pointes en termes constructifs. Ainsi, la dalle du patio sera triangulée par 4 câbles de précontraintes fichés dans les voiles périphériques. En dessous, la dalle de la cour sera portée par des poteaux champignon, une couche de désolidarisation, et une isolation performante sera mise en œuvre pour garantir la conservation des bouteilles.

Les menuiseries imaginées utiliseront dans la mesure du possible le savoir faire du menuisier Ébéniste présent sur place. Ainsi nous nous sommes inspirés de la porte en bois réalisé pour l’actuel bâtiment de réception pour concevoir les nouvelles portes du château. Certains grands éléments vitrés fixes seront néamoins traités en acier ou aluminium pour faire disparaître les châssis de menuiseries.

Durant cette phase de conception, nous avons essayé de dessiner des espaces à la fois généreux, mémorables et fonctionnels, pour que cet outil de travail puisse traverser les âges, et rester adapté à la fabrication d’un produit d’exception.