CENTRE SOCIO-CULTUREL – CABRIÈRES
+ Informations
Nom du projet et Lieu : Centre socio-culturel – Cabrières – 30
Date : 2013-2020
Maître d’Ouvrage : A.Revert + Commune de Cabrières + SPL AGAT
Surface : Surface Utile: 560m²
Budget : 1 250 000 €HT
Programme : Centre Socio-culturel, salle polyvalente de 300 places, aménagement d’un parvis
Equipe : COMBAS (Mandataire)
Images : Javier Callejas © – Palmyre Roigt ©
PAYSAGE TELLURIQUE
Il est des programmes qui participent activement à la vie d’une société, d’un territoire, d’une ville ou d’un village. La commande d’un centre socio-culturel par la commune de Cabrières constitue une pierre angulaire pour son renouveau, en accompagnement du transfert de la mairie actuelle vers le boulodrome. Situé à une dizaine de kilomètres de la métropole Nîmoise, Cabrières est un village implanté sur les coteaux du même massif bordant la ville. À mi-hauteur, le village échappe au risque d’inondation et jouit de vues sur la plaine où la culture des vignes prospère. Nourrie par l’Histoire et par le bon sens des hommes, la commune se démarque par un centre-bourg minéral, une atmosphère mono-matière s’expliquant de manière très rationnelle : un village à la croisée des chemins vers les carrières avoisinantes. Parmi elles, les carrières de Fontvieille, de Vers, de Pondre ou de Beaulieu. À territoire calcaire, architectures minérales dirons-nous. Forte d’un patrimoine architecturale singulier tels que son église du XII° siècle ou son moulin à vent, Cabrières a su o rir un écrin minéral au centre d’un océan végétal qu’est la garrigue gardoise. Mais au-delà de la pureté de ses matériaux, le village s’inscrit dans un territoire historique et minéral encore plus ancien. Avec la Bretagne, ce paysage est seul possesseur de vestiges mégalithiques français majeurs, en témoigne les mégalithes du Causse du Méjean, ceux du Causse de Blandas ou le Dolmen de Barjac. Cette singularité apporte au site de projet une dimension millénaire non négligeable. Nonobstant la richesse historique urbaine et paysagère sans équivoque, le village du Gard rayonne également de par sa forte culture sociale, prépondérante dans la vie méridionale. Alors que la culture des ferias, du vin et de la pétanque articule chaque mode de vie, Cabrières ne semble pas avoir de réel lieu de rassemblement entre ses murs. À la place, le long de l’axe joignant le centre-bourg au cimetière, en bordure de village, un boulodrome accueille ses événements et active la vie sociale locale. Ce lieu, c’est le site choisi par la commune pour son projet de construction d’un espace socio-culturel. C’est aussi l’endroit où la mairie sera transféré. Le lieu citoyen de Cabrières.
RÉINVESTIR UN LIEU ET SES USAGES
Le long du chemin du Moulin à Vent, axe historique joignant le cimetière à l’église, le bâtiment joue la carte de la continuité bâtie et recrée un front urbain en investissant la frange Ouest du site. La minéralité du village regagne ses axes les plus importants et se développe tout du long.
Mais outre la rue existante, des pratiques et des usages ont laissé des traces sur le terrain. C’est d’ailleurs ce qui a guidé l’implantation du projet. Les écoliers avaient l’habitude de traverser le site sur sa partie sud, et de créer un trait d’union entre le chemin du Moulin à Vent, à l’ouest du site, et la route départementale, à l’est, reliant Nîmes au village. Le boulodrome ponctuait ce parcours, matérialisant le lieu de la fête, parée des différents usages apportant vie sociale à la commune. Dans une volonté de préserver et de maintenir les moeurs des cabriérois, le bâtiment marque l’angle Nord-Ouest. Il vient souligner un front bâti minéral et conserve les flux et parcours des habitants. En s’inspirant d’une logique de murs d’enceinte, typiques et représentatifs des tissus locaux, l’édifice s’accompagne d’aménagements pour mettre en valeur ce qui fait l’urbanisme d’un village traditionnel comme Cabrières, emprunt de toute une culture. Dans une parcelle représentant le double de sa superficie, le centre socio-culturel cherche à s’implanter de la manière la plus rationnelle et la plus respectueuse possible vis-à-vis de son environnement. Parce que concevoir un équipement urbain, c’est aussi et surtout respecter –si ce n’est enrichir– l’expérience des habitants, leurs habitudes, et l’atmosphère qui fait l’identité du lieu.
Le bâtiment, grâce à son implantation, va ainsi préserver les déambulations existantes, tout en soulignant son tissu urbain. Le vide répondant directement à la masse bâtie, un espace public se dessine de lui même.
Le cabriérois passera au travers d’un mur d’enceinte en pierre, émergence minérale de l’équipement public, pour traverser une place ombragée où un majestueux micocoulier est conservé, racontant aux visiteurs la mémoire du lieu.
UN LIEU ADAPTÉ AUX USAGES MULTIPLES
Outre la forme donnée au bâtiment, cette dernière répond également à un programme particulier. La simplicité du fonctionnement résonne avec la pureté de ses formes.
Comme nous l’avons vu précédemment, le bâtiment abrite en son sein deux espaces majeurs : le hall d’accueil, et la salle principale. Ces deux pièces, continues avec les aménagements extérieurs, se dessinent par les interstices et les vides creusés dans l’ensemble minéral. Les pièces privées et techniques correspondent quant à elles aux socles massifs du projet. Les pleins et les vides composent l’évidence programmatique. Alors que le hall d’entrée, ouvert sur l’esplanade, s’entoure, de part et d’autres, du bar et de la salle des associations, l’espace scénique de la salle principale s’adosse contre les locaux de rangement, les loges, et les locaux techniques. Chaque articulation du programme permet à l’ensemble de fonctionner par secteurs, et d’assurer une adaptation parfaite à chaque usage.
Durant les festivals de jazz, le public profite de la grande salle tandis que les artistes utilisent le patio pour accéder directement à leurs loges attenantes à la scène.
Un jour de loto ou de mariage, les usagers ouvrent largement la salle sur la placette et profitent de son espace traversant et continu sur l’extérieur.
Lors de séances de cinéma ou de représentations théâtrales, les rideaux occultants masquent les baies vitrées de la salle principale. Réunions associatives, séances de yoga, cours de ping-pong, ou élections… Chaque parcours découle de la forme générale. Chaque événement est anticipé. C’est le lieu du rassemblement et du partage, où se rencontrent et se retrouvent les habitants de Cabrières. L’équipement accueille des moments de vie, et concrétise des instants partagés. Mais au-delà de l’évolutivité des usages qu’offre l’équipement, l’idée était également d’isoler par secteurs chaque ensemble de pièces, afin d’offrir sécurité et adaptabilité aux usagers.
Quant à l’approche acoustique du projet, véritable enjeu technique, sculpter la sous-face de la toiture tout en lui préservant son épaisseur nous aura permis d’y intégrer des parois acoustiques. Un système de panneaux modulables ainsi que des rideaux complètent l’ensemble au gré des événements que l’équipement accueille, jusqu’à assurer l’efficience acoustique face à des situations de musiques amplifiées, lors de concerts.
SCULPTURE ÉLÉMENTAIRE
Entre l’espace public et l’équipement, un dialogue se crée. Le programme et le bâtiment se mettent en relation directe avec la place aménagée. Le programme demandé par la commune est simple : un hall et une grande salle, complétée par des pièces de service ou des locaux privés.
Une pièce majeure. Une vue. Une baie.
C’est ce principe qui va régler et guider la conception du bâtiment. Étant donné le caractère minéral de la commune et ses vestiges mégalithiques, le projet s’appréhende comme un volume pur et minéral que l’on va creuser. Conçu à l’image d’un dolmen, le centre socio-culturel va se composer de socles massifs, surmontés d’une toiture plate, le tout formant un ensemble élémentaire. Ses bases massives aménagent une sous-face largement ouverte sur l’espace public et son micocoulier, tandis qu’un interstice s’ouvre sur la façade Est, sur le boulodrome et la future esplanade de la Mairie.
Dès lors que l’ensemble mégalithique émerge, l’édifice se raconte de lui-même. Le public est accueilli dans l’équipement depuis le parking et le boulodrome, avant d’être conduit dans une grande salle traversante. La placette devient alors une évidence : la grande salle profite de sa large baie, et déploie ses usages vers l’extérieur. À l’intérieur, la sous-face de la toiture et les socles massifs se creusent et offrent aux usagers une grande pièce carrée. Au nord, un patio assure le caractère traversant de la salle, et se met à distance de la rue par un alignement de colonnes. Tout n’est que composition primaire. Des espaces purs, à l’agencement efficace, au service d’un équipement public et de son contexte. En effet, le bâtiment s’implante sur un plateau dont l’altimétrie a été conservée en l’état : légèrement encastré dans le sol, il préserve les vues des habitations voisines sur le grand paysage gardois, assume le terrain existant qu’il investit, et limite les potentielles nuisances qu’impliquerait ce type de programme dans un tissu urbain dense. Il en résulte un mégalithe mettant à profit sa pureté et la déclivité du chemin du Moulin à vent pour souligner l’angle Nord-Ouest du terrain, sans l’écraser par son volume. Le geste se veut humble et protecteur envers les habitants, envers l’architecture du centre- bourg, envers Cabrières.
MATIÈRE PREMIÈRE
Ce projet de mégalithe raconte avant tout une matière, une minéralité. Le long du Chemin du Moulin à Vent, les socles en pierre racontent la propagation du matériau à travers la ville, soulignant l’histoire du lieu. Des blocs de pierre porteuse de 37 cm issus des carrières de Beaulieu composent leur structure tandis que des dalles de cette même pierre, posée sur plots, retournent le matériau en surtoiture. La ressource est locale. Elle assure la pérennité du projet dans le temps et dans son paysage. Depuis l’espace public, la pierre souligne l’ombre et la lumière et fait écho à la dimension élémentaire et intemporelle des dolmens. Elle fait appartenir le projet à son sol, l’intègre dans son paysage géologique. Construire un tel équipement public en pierre, c’est mettre en évidence les liens entre une culture de la fête et du rassemblement –une culture humaine– avec son sol et son paysage tellurique.
L’absence d’isolation intérieure permet de garder apparente la pierre calcaire depuis l’intérieur. Dans une harmonie de matériaux, des lattes de chêne sur chant pavent la salle principale tandis qu’un béton quartzé prolonge le sol extérieur. La rudesse de certains comportements auxquels le bâtiment sera soumis a justifié le choix de matériaux particulièrement robustes. Le béton de planche apporte une douceur et une sensibilité à ce matériau froid, tandis que le sol en béton quartz jaune éclaire et réchauffe le gris et le blanc de la charpente traditionnelle. Les menuiseries en acier blanc sont toutes recoupées en module de 45 cm de large pour rendre facilement remplaçables les vitrages très exposés. L’ensemble des équipements est dissimulé pour ne pas être exposé aux dégradations.